PUFFALIS - Journal & Livre de bord

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03/04/2017

Une photo de l’équipe en guise de conclusion au sortir de 2 semaines intenses de travail en mer. L’équipe scientifique est de retour dans ses laboratoires pour analyser les échantillons et données récoltés et l’équipage est déjà à pied d’œuvre pour préparer la prochaine mission qui commence dans quelques jours seulement.

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Nous avons réalisé hier nos deux dernières stations d’échantillonnage de la mission. Notamment nous avons fait des chalutages profonds à plus de 400 m de fond le matin et le soir à la recherche d’un poisson hachette particulier, une nouvelle espèce qui vient d’être décrite à partir d’un spécimen qui avait été trouvé près du récif Tombo au niveau de la passe de Boulari. Nous avons effectivement ramené des poissons hachettes mais tous de petite taille et il va falloir un examen minutieux à la loupe binoculaire pour savoir si il y a effectivement des spécimens de la nouvelle espèce.

Nous avons terminé le travail vers 20h et avons fait route afin d'aller mouiller à l'abri du phare Amédée dans le lagon. Cette dernière soirée a été l'occasion de rassembler tout le monde autour d'un buffet sur le pont.  Il s'agissait en plus d'un jour spécial puisque c'était l'anniversaire du commandant et les cuisines avaient préparé un gâteau d'anniversaire. Pour terminer la soirée les musiciens qui étaient à bord nous ont joué des morceaux qui nous ont même permis d'esquisser quelques pas de danse. Ce fut un moment de convivialité très apprécié de tous pour clôturer 2 semaines de travail intense.

Ce matin nous avons levé l'ancre alors que le soleil se levait sur le phare Amédée embrumé et nous avons fait route pour arriver au quai des scientifiques vers 9h. Cette mission s'est très bien déroulée et nous sommes satisfaits des résultats accumulés. Le plus gros du travail commence maintenant avec l'analyse des échantillons qui va commencer aussitôt et ensuite l'analyse des données qui prendra plus de temps.

20170402_1Les petits poisons hachettes des profondeurs

20170402_2Joyeux anniversaire commandant !

20170402_3Un petit air de musique pour finir la soirée

Le rythme de travail est intense avec deux stations d’échantillonnage par jour. Cependant, entre la mise à l’eau des différents engins d’échantillonnage, la vie quotidienne suit son cours. Hier, le salon de coiffure était ouvert sur le pont arrière. Le bosco a de multiples talents : il a coupé les cheveux à quelques personnes du bord.

La nuit derniere, nous avons eu quelques beaux spécimens dans le chalut à 35 m. Il y avait,  notamment, de magnifiques larves de langoustes ou de popinées de grande taille. Totalement plates et transparentes, elles sont particulièrement bien adaptées à la vie pélagique. Leur grande taille et leur transparence leur permettent vraisemblablement d’échapper à la plupart des prédateurs. Malgré tout on les retrouve fréquemment dans les estomacs des thons. Ces larves, appelées phyllosomes pourraient inspirer des cauchemars à certains.

Ce matin nous ne sommes pas très loin de la passe de Dumbéa. La mer est calme et c’est samedi matin ; les petits bateaux de plaisance sont de sortie, qui tournent aux environs du dispositif de concentration de poissons (DCP) qui est ancré là. On aperçoit aussi beaucoup de puffins qui volent dans la zone, se posent sur l’eau et chassent.

20170401_1Salon de coiffure improvisé

20170401_2La larve phyllosome de langouste ou de popinée, totalement plate et transparente

20170401_3Le dispositif de concentration de poissons (DCP) constitué d’une série de bouées en surface, entouré de petits bateaux de pêche

20170401_4Bateaux de plaisance en pêche entourés de puffins

20170401_5Bateaux de plaisance en pêche entourés de puffins

Les îles de la mer de Corail abritent les colonies de reproduction de plusieurs espèces de “pétrels” ou Procellariidae. Le plus abondant, en cette saison de l’année, à terre comme en mer est le puffin pacifique, l’espèce dont nous étudions les déplacements alimentaires.

En mer, il nous arrive d’observer deux autres oiseaux marins emblématiques de la Nouvelle-Calédonie. L’un niche en petites colonies dans les hauteurs de la chaîne : c’est le pétrel de la Chaîne, une sous-espèce endémique du pétrel de Gould. Plus petit que le puffin, son vol est aussi plus rapide. On le repère de loin en mer, lorsqu’il expose sa partie ventrale qui est blanche. L’autre est le pétrel de Tahiti, dont les colonies, peu denses, sont disséminées sur la Grande Terre. De telles colonies ont été repérées sur les contreforts du massif du Koniambo. L’exploitation minière est une menace mortelle pour ces oiseaux, puisqu’avant d’accéder au minerai, les exploitants décapent les premiers mètres du sol de la forêt, là où, justement, nichent les pétrels de Tahiti. Ceux-ci sont classés comme quasi-menacés d’extinction sur la Liste rouge de l’Union mondiale pour la nature (IUCN). Le vol du pétrel de Tahiti est remarquable : par temps d’alizé, l’oiseau tend ses longues ailes effilées et tire sans effort un bord après l’autre en épousant le relief en mouvement de la houle.

Cet après-midi, alors que l’Alis complétait son transect au large, l’attention des officiers de la passerelle a été attirée par les éclaboussures d’animaux marins de grande taille sautant au loin : s’agissait-il d’une chasse de thons ? de marlins ? ou bien des cétacés chassant ou jouant ? L’Alis a légèrement changé de cap pour s’en approcher. La queue effilée d’un cétacé faisant une cabriole etait un instant visible dans les jumelles. Puis deux grands cétacés noirs, nageant de concert, ont fait leur apparition : corps allongé, tête arrondie, aileron falciforme : il s’agissait de fausses-orques ! Celles-ci disparurent rapidement dans les reflets du soleil. Mais à quelques encâblures de là, un autre groupe de cétacés plus petits restait en surface, sautant à l’occasion : il s’agissait d’une troupe de dauphins de Risso, que nous eûmes le loisir d’observer pendant plusieurs minutes.

20170331_1Le pétrel de la Chaîne Pterodroma leucoptera caledonica, sous-espèce endémique à la Nouvelle-Calédonie

20170331_2Observation fugace d’un pétrel de Tahiti Pseudobulweria rostrata, espèce quasi-menacée d’extinction selon l’IUCN

20170331_3Des puffins Ardenna pacifica en action de pêche au large de Roche-Percée

20170331_4Des dauphins de Risso Grampus griseus par 22°03S 165°29E, aujourd’hui à 05:43 TU

A chaque station, un profileur acoustique permet de compléter l’échantillonnage biologique du zooplancton : il s’agit du Tracor Acoustic Profiler Sensor (TAPS). Le filet à zooplancton permet un échantillonnage stratifié a cinq intervalles de profondeur differents : lors de la mission PUFFALIS, la couche 0-200 m est ainsi échantillonnée par deux filets intégrant chacun 100 m de profondeur, soit une resolution de 100 m. Le profileur acoustique permet d’obtenir des profils de zooplancton jusqu’à une profondeur de 200 m, mais avec 2 m de résolution verticale, ce qui la rend comparable à celle des profils de la température, fluorescence, etc. Ceci qui facilite la recherche de correlations entre la distribution du zooplancton et les paramètres oceanographiques.

Le TAPS comporte six émetteurs-récepteurs d’ultrasons ou transducteurs qui émettent à très hautes fréquences, de 265 kHz à 3 MHz. Cet instrument a été conçu pour détecter, en particulier, le méso-zooplancton, gamme d’organismes de taille >200 µm dominée par les copépodes. Ces derniers sont présents dans tous les océans du globe et constituent des proies essentielles pour le zooplancton plus gros et pour les petits poissons pélagiques.

Un traitement mathématique par inversion de ces données multifréquences, utilisant un modèle de diffusion acoustique adapté aux copépodes, permet de reconstituer la composition en classes de tailles de la communauté méso-zooplanctonique détectée à chaque profondeur du profil. Par la réalisation des mêmes stations de jour et de nuit, on peut observer lamigration nycthémérale des animaux.

On observe souvent, comme ici, une plus grande concentration de zooplancton dans la couche de mélange, soit la tranche d’eau où la température est la plus chaude, soit les 40 premiers mètres sous la surface dans le cas présent. Ce sont surtout les plus petits organismes du zooplancton qui s’y concentrent alors que les plus gros sont plus en profondeur le jour et migrent la nuit vers le haut pour se nourrir. Le jour les plus gros organismes se protègent des prédateurs en restant au fond. Les pics à 100 m du profil de nuit se trouvent juste au-dessus du maximum profond de fluorescence, profondeur intéressante pour les animaux phytophages. Le profil s’arrêtant à 200 m, il est possible que les organismes que l’on détecte la nuit viennent de plus profond encore.

20170330_1Mise à l’eau du TAPS

20170330_2Exemple de profils obtenus aux 6 fréquences (à droite) en fonction de la profondeur, associés au profil de température (à gauche)

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Hier a été une journée particulière. En effet, il a fallu s’occuper des problèmes hydrauliques du dernier chalutage. L’équipe de la machine a travaillé d’arrachepied toute la journée et une bonne partie de la nuit afin de réparer la pompe. Nous n’avons donc pas pu faire d’échantillonnage mais les réparations étaient indispensables pour continuer la mission. Nous avons optimisé notre temps en réalisant un trajet avec le bateau pour acquérir des données acoustiques notamment.

Ce type d’évènement met bien en évidence l’importance du rôle de l’équipage dans toute mission scientifique. A bord de l’Alis l’équipage est composé du commandant, de son second et du lieutenant qui œuvrent en passerelle. Il y a également une équipe de 3 personnes en machine : le chef, le second mécanicien et l’ouvrier mécanicien. Sur le pont, à la mise à l’eau des engins scientifiques il y a un bosco et 3 matelots. Et enfin pour maintenir le moral des troupes il y a un cuisinier et son second.

Tout l’équipage met beaucoup de cœur à l’ouvrage et on les remercie chaudement pour leur professionnalisme, leur disponibilité, leur gentillesse et leur bonne humeur.

20170329_1Le commandant et le second mécanicien

20170329_2Le second et le lieutenant

20170329_3Le chef et le troisième mécanicien

20170329_4Le bosco

20170329_5Les matelots

20170329_6Le chef cuistot et son second

Hier après-midi, sur l’écran de l’échosondeur, nous avons pu voir de très forts échos à toutes les fréquences. Bien qu’en période de repos, l’équipage a gentiment accepté de se remettre au travail pour mettre le chalut à l’eau et tenter de capturer les organismes produisant ces échos. D’après le positionnement du chalut, nous sommes passés exactement dans les densités les plus fortes de la détection et nous étions impatients de voir remonter le chalut. Nous avons été déçus de n’avoir capturé que quelques organismes gélatineux, quelques petits poissons et quelques crevettes. Il est possible que les détections aient correspondu à des animaux nageant rapidement et qui ont ainsi pu éviter le chalut.

La nuit dernière, à la station 16, nous avons pris du retard dans la mise à l’eau du chalut, suite à une avarie de la pompe hydraulique. Nous avons finalement pu déployer le chalut tard dans la soirée. Mais seulement quelques minutes avant de virer le chalut, un raccord du système hydraulique a cédé. Une réparation de fortune a été faite afin de récupérer le chalut, soit après un peu plus de 3 heures de pêche au lieu de la demi-heure de trait habituelle. Nous avons récolté une bonne quantité d’ostracodes (des petits crustacés en forme de boule) ainsi que des anchois, des poissons lanternes, quelques juvéniles de poissons du récif et des larves leptocéphales. Le chalutage ayant été effectué vers 100 m de profondeur, il s’agissait d’un mélange d’organismes de surface et d’organismes de profondeur.

20170328_1Capture d’écran de l’échosondeur, montrant de denses agrégations d’organismes à quelques dizaines de mètres sous la surface

20170328_2La totalité de la récolte de l’après-midi dans les agrégations observées à l’échosondeur: décevante

20170328_3Les poissons récoltés lors du coup de chalut impromptu de l’après-midi

20170328_4Vers 100 m, après trois heures de trait : une soupe d’ostracodes, agrémentée de poissons pélagiques

20170328_5Délicate et transparente, subtilement ornée de pointillés : une larve leptocéphale de murène

20170328_6Quelques poissons volants ont été aperçus à l’étrave de l’Alis. D’un élégant mouvement de godille, celui-ci appose sa signature à la surface de la mer

Les courants marins peuvent être mesurés jusqu’à une certaine profondeur sur les navires océanographiques. Pour mesurer les courants, on utilise un instrument, le S-ADCP (Ship Borne Acoustic Doppler Current Profiler), qui est basé sur l’effet Doppler. Le principe s’appuie sur le fait que les particules dans l’eau bougent passivement en fonction des courants. Le S-ADCP est un sonar qui envoie une onde acoustique sous le bateau à une certaine fréquence, et mesure la fréquence du signal retour. Comme les particules bougent avec la masse d’eau, la fréquence retour des ondes acoustiques est modifiée et la vitesse de déplacement des particules (le courant marin) est estimée tout comme les radars routiers mesurent la vitesse des voitures.

Pendant la première semaine de la campagne Puffalis, nous avons observé une variété de courants horizontaux le long du trajet. Lors du trajet nord/nord-ouest vers la colonie de puffins de Pindai le long de la côte de la Nouvelle-Calédonie, les courants étaient globalement vers le sud-est dans les 400 premiers mètres, situation classique due au courant de l’ALIS qui est actif dans cette direction l’été. Le courant de l’ALIS s’écoule à l’opposé des vents dominants pour une raison encore mal comprise.

En arrivant dans la région de Pindai et en commençant notre transect côte-large vers le sud, le courant était toujours vers l’est. A notre retour vers la côte le courant était plutôt vers l’ouest. Ensuite lors de notre trajet de Népoui vers le nord/nord-ouest le long de la côte nous avons d’abord rencontré des courants vers l’est puis des courants vers l’ouest.

La variabilité du courant est illustrée à plus grande échelle par une carte du niveau de la mer du 22 mars 2017. La carte montre un tourbillon cyclonique (qui tourne dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère sud) dont nous échantillonnons le bord. La présence du tourbillon est intéressante car on suppose que les tourbillons et les fronts peuvent structurer les écosystèmes marins et la nourriture des oiseaux marins et des thons.

A partir du niveau de la mer on est capable de mesurer les courants marins de surface que l’on nomme les courants géostrophiques. On note une différence entre les courants déterminés par le S-ADCP et ceux dérivés du niveau de la mer. Il est possible que les courants mesurés par le S-ADCP soient biaisés par les courants de marée. De plus l’image satellite est statique et date du 22 mars alors que les mesures prises par le bateau sont dynamiques et couvrent une semaine entière.

Le S-ADCP regardant la vitesse de déplacement des particules au 70 kHz, le signal retour permet de voir des organimes dont la taille varie entre le zooplancton et le micronecton. On peut donc aussi utiliser le signal du S-ADCP comme un proxy de la biomasse qui est indiquée par la couleur des points sur la carte montrant que la biomasse est la plus forte au large de Pindai.

20170327_1Les courants moyens entre la surface et 400 m de profondeur selon le S-ADCP à bord de l’Alis le long du trajet indiqué par les points colorés du 18 au 27 mars 2017. Les points rouges indiquent de fortes biomasses de zooplancton/micronecton, et les points bleus de faibles biomasse. Les flèches indiquent les courants vers l’est en bleu et les courants vers l’ouest en rouge. Le fond de carte représente le niveau de la mer par satellite du 22 mars 2017 et les courants géostrophiques dérivés du niveau de la mer

La nuit dernière après la fin du travail en station nous avons fait route vers le nord avant de faire demi-tour pour revenir à la même station que la nuit dernière. L’objectif de ces trajets est d’acquérir en continu des données en acoustique pour déterminer la distribution spatiale et dans la colonne d’eau du micronecton et du zooplancton.

Ce matin, de retour à la station d’hier soir, nous avons effectué la même série de mesures que la veille au soir pour comparer les situations de jour et de nuit. Le maximum profond de phytoplancton était à 130m. Ce matin il semblait y avoir plus de zooplancton qu’hier soir alors que l’on s’attend à une plus forte abondance la nuit. Au niveau des contenus des chaluts effectués à 20 m de profondeur, nous avons observé des Myctophidae ou poissons lanterne, des larves leptocéphales de poissons anguilliformes et beaucoup d’ostracodes la nuit alors qu’il y avait surtout des larves de crustacés dans le chalut de ce matin.

Nous avons effectué notre deuxième chalutage de jour à 300m de profondeur où aucune détection n’est observée le jour en général. Nous avons eu la surprise de trouver dans le chalut des méduses de couleur ambrée

20170326_1Profils verticaux de nuit (gauche) et de jour (droite), entre la surface et 200 m de profondeur, montrant la fluorescence qui est un indice du phytoplancton avec un maximum vers 120 m de profondeur (courbe verte), l’oxygène dissous avec un pic vers 90-100 m (courbe jaune), la température qui est homogène en surface jusqu’à 60m la nuit et jusqu’à 40 m le jour avant de diminuer avec la profondeur (courbe bleue), et la salinité homogène le jour entre la surface et 40 m mais déstructurée la nuit dans cette même couche (courbe rouge)

20170326_2Des larves de crustacés avec d’exubérantes protubérances, capturées à 20m, de jour

20170326_3Des larves leptocéphales de poissons anguilliformes capturées à 20 m de nuit

20170326_4Des petits Myctophidae, poissons lanternes, capturées à 20 m de nuit

20170326_5Des méduses ambrées capturées à 300m de profondeur

Nous avons passé la nuit au mouillage en baie de Nepoui et repris la mer tôt ce matin. A la sortie de la passe de Mueo, nous avons croisé des centaines de puffins qui se dirigeaient vers le nord.

Après un premier chalutage vers 45m, nous avons décidé de chaluter très en profondeur,  vers 510 m. La récolte a été faible mais elle contenait des spécimens très intéressants de poissons notamment des Sternoptychidae ou poissons-hachettes et de nombreux Cyclothone, de petits poissons transparents avec de nombreux chromatophores noirs et des photophores.

En milieu d’après-midi, par mer calme, un groupe compact de quatre baleines à bec a fait surface à quelques encablures sur tribord. L’Alis croisait alors au large de Vavouto. La profondeur était d’environ 1040 m. Les cétacés ont émergé encore trois fois, de façon synchrone, avant de sonder et disparaître. Ils semblaient s’éloigner du navire. Dans les jumelles, on pouvait distinguer un petit aileron dorsal triangulaire, légèrement falciforme, de couleur sombre, très en arrière du dos plus pâle, de couleur bronze. A un moment, le plus gros individu du groupe a sorti la tête hors de l’eau, mais de façon si furtive qu’il était impossible de bien distinguer les caractères qui auraient éventuellement pu permettre de l’identifier à l’espèce.

20170325_1Deux puffins volent en tandem

20170325_2Deux Cyclothone remontés des profondeurs de la mer de Corail

20170325_3Des poissons de la famille des Sternoptychidae, ou poisons hachettes

Hier enfin la météo a été un peu plus clémente et nous avons pu faire toutes les opérations prévues lors de la station d’échantillonnage du soir. Nous avons fini le travail vers minuit et demi et avons aussitôt fait route vers la terre pour arriver ce matin à 7h00 en baie de Népoui en Province Nord. En effet aujourd’hui est une journée spéciale pendant la mission puisque nous allons à la rencontre des lycéens et des officiels de la Province nord.

En effet, dans le cadre du projet BIOPELAGOS notre rôle consiste également à renforcer les capacités en expliquant notre travail et son intérêt à la fois aux scolaires mais aussi auprès des personnes impliquées dans la gestion des milieux naturels et de leurs ressources.

Ainsi l’équipe scientifique a débarquée dans la presqu’ile de Népoui où nous avons retrouvé Sophie et Aurélien deux des ornithologues qui sont toutes les nuits dans la colonie de puffins de Pindai pour équiper les oiseaux de GPS. Nous avions rendez-vous au lycée de Pouembout pour passer 1h30 avec une classe de bac professionnel en gestion des milieux naturels et de la faune. Nous leur avons présenté l’ensemble des travaux effectués en mer et à terre. Les élèves étaient très intéressés et ont posé de nombreuses questions pertinentes, ce fut un moment d’échange très enrichissant.

Dans l’après-midi nous avons reçu à bord de l’Alis des personnes de la Province nord du service de l’environnement et du service des pêches. Nous avons pu leur expliquer notre travail avec démonstration des différents instruments utilisés. Là encore les échanges ont été très enrichissants et nous avons passé un excellent moment.

Nous repartons en haute mer dans la nuit pour être sur la prochaine station d’échantillonnage demain matin à 7h00.

20170324_1L’Alis au mouillage en baie de Népoui

20170324_2Travaux pratiques de sciences naturelles avec les élèves du lycée professionnel agricole de Pouembout en Province Nord

20170324_3Portes ouvertes sur l’Alis mouillé en baie de Népoui avec les gardes-nature du service de l’environnement et des personnels du service des pêches de la Province Nord, qui écoutent la présentation faite par Anne sur l’acoustique

Au cours de cette mission, nous étudions les premiers niveaux du réseau alimentaire. Et notamment nous échantillons le zooplancton, ces petits organismes qui consomment le phytoplancton ou producteurs primaires (l’équivalent des végétaux dans le système terrestre). Le zooplancton est le premier niveau de prédateurs. Ils sont d’une taille souvent inférieure au millimètre et ils sont ballotés par les courants. Ils peuvent cependant effectuer des migrations verticales pour aller vers la surface ou vers le fond.

Le zooplancton est consommé à son tour par des petits prédateurs comme les larves de poissons et donc s’il n’a pas un intérêt direct pour la pêche dans notre région, il est très important pour l’ensemble de la chaine alimentaire.

Nous étudions le zooplancton à l’aide d’un filet qui possède 5 nappes qui l’on peut fermer et ouvrir à la profondeur que l’on veut. Grace à cet engin nous échantillonnons les couches 600-400m, 400-300, 300-200, 200-100 et 100m-surface. En général c’est la couche entre 100m et la surface qui est la plus riche.

On récolte de petites quantités de zooplancton d’une couleur rosâtre et constitué principalement de crustacés que l’on ne distingue pas vraiment à l’œil nu. Les échantillons sont conservés dans le formol et seront plus tard analysés pour identifier au microscope les espèces présentes, les compter et déterminer leur poids.

20170323_1Preparation du filet a zooplankton

20170323_2Transfer du zooplankton du collecteur vers les flacons de stockage

20170323_3Un échantillon de zooplancton

20170323_4Une vue plus pres de l’echantillon de zooplankton

Un des objectifs de la mission PUFFALIS est l’inventaire des espèces du micronecton de la mer de Corail. Chez les poissons, une partie des individus échantillonnés à l’aide du chalut à micronecton sont des juvéniles ou des larves. Il est souvent très difficile d’identifier ces dernières à l’espèce, car celles-ci ne présentent pas encore les caractères morphologiques ni les patterns de coloration qui, lorsqu’on a en main des adultes, permettent de les distinguer des individus d’espèces voisines.

Une approche utile pour la détermination de l’individu à l’espèce est le DNA barcoding. L’espèce est caractérisée par une séquence ADN donnée. Celle-ci reste la même quel que soit le stade de développement de l’individu, de l’embryon à l’adulte. La séquence de l’ADN de la larve ou du juvénile permet donc son identification à l’espèce par simple recherche de la même séquence dans une base de données de référence, établie sur une collection de poissons adultes identifiés morphologiquement.

Chaque poisson capturé dans le filet à micronecton est ainsi photographié et un sous-échantillon de tissu (par exemple, un bout de nageoire) est préservé au sec sur une feuille de papier. Ce sous-échantillon constitue la source de l’ADN, lequel sera ensuite séquencé dans un laboratoire équipé pour la biologie moléculaire. Les séquences ADN seront comparées à celles des bases de données existantes, qu’elles contribueront, par la même occasion, à enrichir.

20170322_1Extravagants : quelques représentants du micronecton de la mer de Corail

20170322_2Cuvette avec les poissons triés par espèce (à gauche) et feuille de papier avec les sous-échantillons de tissu sec correspondants (à droite)

Nous avons effectué notre première station de nuit hier soir dans des conditions un peu difficiles avec une mer agitée qui rend les manœuvres dangereuses notamment pour la mise à l’eau d’engins lourds comme la rosette ou le filet à zooplancton. Dans ces conditions, nous avons préféré ne pas échantillonner le zooplancton.

Contrairement à ce qui se passe pendant la journée, l’acoustique de nuit nous a montré une accumulation d’organismes dans la zone dite épipélagique à environ 45 m de la surface. Les petits poissons, crustacés et calmars du micronecton remontent vers la surface la nuit pour s’alimenter. De jour, ces animaux descendent plus en profondeur pour, pense-t-on, éviter les prédateurs qui chassent à vue. Nous avons chaluté à 45 m de profondeur et nous avons pu capturer beaucoup d’ostracodes, qui sont des petits crustacés en forme de boule, des Myctophidae ou poissons lanternes ayant migré des profondeurs vers la surface, quelques calmars, des leptocéphales qui sont des larves de poissons anguilliformes comme les anguilles ou les murènes.

Après une courte nuit nous avons repris le travail ce matin avec la série de mesures habituelles. Les conditions de travail restent difficiles à cause de l’état agité de la mer. Nous avons sur le chalut installé le support d’un caisson étanche pour une petite caméra (merci aux amis de Soproner). L’objectif est d’essayer d’obtenir quelques images de ce qui entre dans le chalut. Nous procédons étape par étape : après avoir testé le système de fixation, nous testons maintenant le caisson qui est censé être étanche à 200 m. A la remontée on constate des microgouttes à l’intérieur et on a des doutes sur l’étanchéité du joint. Nous devons faire un second test.

20170321_1La capture de la nuit ; les petits grains sont des ostracodes, de petits crustacés en forme de boule

20170321_2Un Myctophidae ou poisson lanterne

20170321_3Installation du support et du caisson de la camera sur le chalut pour tester l’étanchéité

20170321_4Un puffin pacifique passe à proximité de l’Alis à la station no. 5 ce matin

Nous n’avons pas pu faire la station de nuit prévue hier soir car à cause d’une fuite d’eau à bord nous avons dû nous mettre à l’abri dans le lagon pour effectuer la réparation.

Ce matin nous sommes ressortis en mer pour rejoindre la station d’échantillonnage 3. Les manœuvres vont nettement plus vite qu’hier, tout le monde reprend le rythme. La houle fait rouler le bateau ce qui ne facilite pas le travail. Ce soir, il y a 30 nœuds de vent.

Le mauvais temps affecte la qualité des données acquises en continu, comme celles de l’echosondeur. Le bateau envoie un signal acoustique vers le fond de l’océan et ce signal est renvoyé vers le bateau quand il rencontre des poissons ou d’autres animaux. Le signal ainsi retourné nous informe sur la quantité d’organismes présents et à quelle profondeur ils se situent. Cet outil est précieux, par exemple pour détecter les bancs de poissons pour la pêche. Dans le cas présent, nous utilisons l’acoustique pour déterminer à quelle profondeur nous allons positionner le chalut afin d’échantillonner correctement le micronecton.

20170320_1Dans le PC scientifique, devant l’écran de l’acoustique

20170320_2Le signal acoustique sur 4 fréquences différentes. Les barres blanches verticales résultent d’une absence de réception du signal à cause du mauvais temps

20170320_3Quelques-uns des juvéniles de poissons récoltés aujourd’hui dans le filet à micronecton

Nous sommes arrivés sur la première station d’échantillonnage ce matin de bonne heure. Nous étions en vue de la côte. Le fond sondait à moins de 1000 mètres. Sachant que nous envoyons certains instruments à 600 m de profondeur nous voulons une marge suffisante sous les instruments pour ne pas risquer, en dérivant, de heurter un éventuel relief sous-marin. Un peu de route a été nécessaire pour atteindre la sonde des 1000 m.

Les opérations ont commencé un peu après 07 h du matin. Deux rosettes avec les bouteilles de prélèvement d’eau et la CTD, la sonde qui fournit les informations sur la température et la salinité en fonction de la profondeur, ont été descendues. Un capteur de fluorescence permet aussi de savoir où se trouve le maximum profond de chlorophylle. Ce matin, ce pic était particulièrement peu profond, à 68 m, alors que classiquement il est plutôt vers 100 m de profondeur.

Comme à chaque début de mission des ajustements sont nécessaires. Le profileur acoustique TAPS dédié au zooplancton n’a pas fonctionné à sa première descente, mais nous n’avons pas eu de soucis à la deuxième descente. Des réglages ont également été nécessaires sur le filet à zooplancton avant qu’il soit opérationnel. La récolte du premier trait de filet à micronecton a été relativement maigre : quelques organismes gelatineux, quelques stomatopodes (larves de squilles) et, tout de même, une très belle larve phyllosome de langouste. Le second trait de filet à micronecton a permis une jolie moisson de petits poissons, dont un poisson-flute, un poisson-grenouille, un juvénile de carangue jaune, quelques petits poissons plats et un très beau juvénile de poisson-chirurgien.

Au-dessus de l’eau, le ballet des puffins et des pétrels indique la proximité de la colonie de Pindaï. Demain matin, nous effectuerons notre seconde station de jour, beaucoup plus au large.

20170319_1Vue du pont arrière de l’Alis avec le filet à zooplancton en premier plan, la rosette avec les bouteilles de prélèvement sur la droite et en haut le chalut à micronecton bleu sur l’enrouleur

20170319_2Un stomatopode pris dans le filet a micronecton : transparent mais pourvu d’une armure hérissée d’épines acérées

20170319_3Un petit poisson plat d’à peine 3 cm de longueur, capturé en pleine océan

20170319_4Le puffin pacifique, maître du vent et de l’océan

Nous avons quitté le port ce matin vers 10h sous le ciel bleu de Nouméa. Nous nous dirigeons vers le nord en direction de la zone de Pindaï en Province nord, à petite allure afin d’arriver demain matin sur notre première station d’échantillonnage. Nous avons navigué un moment dans le lagon et nous avons profité de la protection offerte par le récif pour faire un exercice d’abandon du navire. Sept coups de sirène courts et un coup long signifient qu’il faut abandonner le navire. Chaque membre de l’équipage doit aller récupérer son gilet de sauvetage et l’enfiler et doit prendre sa combinaison de survie. Tout le monde se rassemble sur le pont arrière ou on fait l’appel pour vérifier que nous sommes tous là. Après les consignes données par le second et le lieutenant il y a essayage de combinaison de survie, une combinaison étanche qui permet de survivre plus longtemps dans l’eau en cas de naufrage.

Après la fin de l’exercice on continue à mettre de l’ordre dans le matériel et à préparer les flacons en vue du premier échantillonnage. Il faut également monter le filet à zooplancton qui est constitué en fait de 5 filets fixés sur un cadre avec un système qui permet d’ouvrir et de fermer successivement les filets chacun leur tour afin d’échantillonner des profondeurs différentes de l’océan.

Il est 18h, les oiseaux sont au rendez-vous. Par le hublot on peut en voir une trentaine qui semble retourner vers la terre.

20170317_1L’Alis quitte la grande rade de Nouméa

20170317_1Exercise de sécurité

20170318_3Montage du filet à zooplancton

20170317_1Vus cet après-midi par centaines au large du récif, les puffins prospectent l’océan à la recherche de nourriture

Nous sommes en plein préparatifs avant le départ. La journée a été consacrée à l’embarquement du matériel à bord. Nous réalisons beaucoup de manipulations différentes et l’espace disponible étant très petit, ranger tout le matériel afin qu’il soit facilement atteignable et pour qu’en même temps il soit bien caler pour ne pas bouger en cas de mauvais temps revient un peu à faire un jeu de Tetris. Toutes les briques doivent s’emboiter parfaitement.

L’équipage avait également fort à faire pour préparer le bateau et notamment la nouvelle configuration des engins que nous allons tester cette fois-ci. Nous prenons un chalut à micronecton plus petit tracté par un seul câble, ce qui nous permet de prendre une rosette plus grande (12 bouteilles de prélèvement d’eau au lieu de 8 habituellement) qui nécessite l’utilisation d’un treuil plus grand. Il a donc fallu installer une sorte de cage de protection autour du treuil pour que le chalut qui passe par-dessus ne s’accroche pas dedans.

Nous sommes 18 à bord et nous partons pour 2 semaines, cela demande également d’importants préparatifs en cuisine et c’est donc le dernier jour pour embarquer la nourriture, notamment tous les fruits et légumes. Il ne faut pas se tromper dans ses calculs. Mais Jacques et Gaby, notre équipe cuisine a l’habitude et nous savons que nous serons bien nourris et que nous ne manquerons de rien.

20170317_1Le rangement du matériel dans le laboratoire

20170317_2Préparation du coffrage autour du treuil pour ne pas que le chalut en bleu au-dessus s’accroche dans le treuil

20170317_3Embarquement des produits frais

20170317_4Prêt pour une nouvelle mission du projet Biopelagos (Programme BEST 2.0 de l’Union Européenne)

20170317_5L’Alis à quai à Noumea

 

Résumé

Nous nous apprêtons à repartir en mer pour une nouvelle mission dans les eaux de la Nouvelle-Calédonie, quelques mois après la campagne NECTALIS 5 , toujours dans le cadre du projet BIOPELAGOS. Cette nouvelle campagne est un peu différente de la série des Nectalis et elle s’appelle PUFFALIS en référence au puffin fouquet (Ardenna pacifica), cet oiseau marin bien connu en Nouvelle-Calédonie. Il a un plumage sombre et on le remarque surtout de janvier à avril lors de sa période de reproduction. Il niche à terre en creusant des terriers dans le sable en formant des colonies en bord de mer. De nuit il a un cri caractéristique qui fait penser aux pleurs d’un bébé et qui empêche les campeurs de dormir.

 

Notre campagne Puffalis cherche à comprendre ce qui caractérise les zones de nourrissage préférentielles des puffins en mer. Est-ce que les conditions de courants sont spécifiques ? Y a-t’il beaucoup de zooplancton dans ces zones ? Quels sont les poissons qui peuvent servir de proies aux oiseaux ? Faut-il protéger ces zones pour préserver le garde-manger des oiseaux ? Est-ce que les thons viennent manger dans les mêmes zones ? Ce sont autant de questions que nous allons essayer d’aborder pendant notre mission et nous espérons obtenir des débuts de réponses, mais aussi sans doute quelques questions supplémentaires.

Pour cette campagne nous avons le soutien d’une équipe de scientifiques à terre qui ont commencé à travailler dès début mars. Il s’agit d’une équipe d’ornithologues qui équipent les puffins de la colonie de Pindaï en Province Nord. Ils posent des petits appareils de géolocalisation sur le dos des oiseaux, les laissent partir quelques jours en mer où ils vont se nourrir et récupèrent les équipements quand les oiseaux reviennent au nid pour nourrir leur poussins.

Ces informations sont précieuses car elles nous indiquent où vont se nourrir les puffins. Grace à ces données nous avons pu établir un plan d’échantillonnage pour aller collecter des informations en mer. Comme pour les campagnes Nectalis nous recueillerons des données sur la physique et la chimie de l’océan (courants, température, salinité, nitrates, silicates, phosphates…), et sur la biologie (phytoplancton, zooplancton et micronecton, les petits poissons, calamars et crustacés mangés par les oiseaux marins et les thons).

La campagne Puffalis débute le 18 mars 2017 et une équipe de 6 scientifiques de l’IRD et de la CPS sera à bord pour 2 semaines avec un retour le 2 avril. Il est prévu de faire une escale en Province Nord pour aller à la rencontre des scolaires pour leur expliquer notre travail et échanger avec eux.

puffin
Un puffin fouquet (Ardenna pacifica) devant l’entrée de son terrier


trajetsLes traits fins indiquent les trajets des oiseaux en mer et la diagonale noire avec des losanges blancs indiquent le trajet prévisionnel du bateau pendant la mission Puffalis.


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Last Updated on Tuesday, 04 April 2017 11:14
 
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