Les risques « masqués » pour la santé du changement climatique

Nouméa

La réalité du changement climatique ne fait plus guère débat. Ses impacts les plus visibles se font déjà sentir partout sur la planète, et l’évolution des conditions météorologiques touche des milliards de personnes. Alors que les débats autour du changement climatique tournent généralement autour des tempêtes de grande envergure et des inondations massives, d’autres modifications moins visibles se produisent, des évolutions qui, à long terme, pourraient se révéler plus dangereuses que le plus violent des cyclones.
La semaine dernière, j’ai participé à une rencontre portant sur l’une de ces menaces « masquées » : l’impact du changement climatique sur la santé mondiale. Il n’y était pas question du bien-être de la planète, mais plutôt de l’avenir de la santé humaine alors que nous sommes tous contraints de nous adapter aux conséquences du changement climatique.

La discussion s’est déroulée à l’occasion du Sommet mondial de la santé du Conseil international des infirmières (CII) organisé à Philadelphie. Fort de plus de 20 millions de membres dans le monde, le CII est l’organisme chef de file des associations d’infirmiers. Dans tous les systèmes de santé, les infirmières figurent parmi les professionnels les plus influents. Elles jouent un rôle politique considérable qui peut avoir des répercussions sur l’évolution sociale et le comportement des patients face aux défis sociétaux. De nombreux intervenants de premier plan participaient au sommet, notamment la Première ministre de la Nouvelle-Zélande, Helen Clark, qui a très bien résumé dans son discours d’ouverture les enjeux de santé mondiaux et le rôle des infirmières dans la gestion des crises humanitaires.

Ma présentation, quant à elle, était axée sur les impacts plus larges du changement climatique, et notamment ses effets négatifs sur la santé humaine. J’ai profité de cette occasion pour souligner les défis auxquels sont confrontés chaque jour les petits États insulaires en développement du Pacifique.

Les membres de la Communauté du Pacifique (CPS) savent que le changement climatique a déjà des répercussions importantes, directes et indirectes, sur la santé humaine. Les déterminants environnementaux et socioéconomiques de la santé sont clairs. L’élévation du niveau de la mer, l’acidification des océans ainsi que les intempéries de plus en plus fréquentes et de plus en plus graves ont des conséquences directes sur la sécurité hydrique et alimentaire. Ces phénomènes accélèrent la propagation des maladies transmissibles, augmentent la prévalence des maladies respiratoires, et contribuent même à l’apparition de troubles mentaux.

J’ai rappelé aux participants que la lutte contre le changement climatique allait bien au-delà du développement ou de l’aide extérieure. Elle doit au contraire être considérée comme un défi moral que toutes les nations doivent relever. Aujourd’hui, les effets du changement climatique se font principalement sentir dans les communautés vulnérables telles que celles que l’on trouve dans toute l’Océanie et qui, paradoxalement, ont très peu contribué à ses causes. Mais ne vous y trompez pas, si la communauté internationale ne prend pas de mesures, les impacts et les coûts du changement climatique seront catastrophiques pour nous tous.

Il m’est apparu clairement que de nombreux participants venus d’Europe et d’Amérique du Nord n’avaient pas conscience du fait que le changement climatique menace déjà le Pacifique. Ainsi, l’exemple des communautés entières qui ont dû être déplacées vers des zones plus élevées à cause de l’élévation du niveau de la mer a été accueilli avec surprise et émoi.

Cette méconnaissance est en partie due à notre situation géographique. En effet, pour beaucoup de personnes vivant dans d’autres régions du monde, l’Océanie est un endroit isolé, une destination exotique, et les événements qui ont lieu ici ne sont généralement traités que superficiellement par la presse à l’autre bout de la planète. Toutefois, le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris et les activités de personnes niant la réalité du changement climatique ont contribué à masquer les faits et à brouiller les cartes, notamment en Amérique du Nord. La conférence m’a permis de défendre et de soutenir la dynamique impulsée par l’Accord de Paris. Bien que le retrait des États-Unis constitue un sérieux revers, la mise en œuvre effective de cet accord revêt une importance capitale pour les dirigeants océaniens.

J’ai donc été rassuré de constater la réaction positive des participants à l’appel les incitant à exercer l’influence que leur confère leur statut d’organisation non gouvernementale, d’organisation philanthropique, de simple citoyen ou de membre d’une association professionnelle telle que le CII afin de combler le vide créé par le retrait des États-Unis. Si nous travaillons ensemble, en tant que membres de la communauté internationale, nous pouvons continuer à échanger des idées, à étudier des solutions et à relever les défis du changement climatique.

Si nous y parvenons, nos enfants et nous-mêmes pourrons mener une vie plus saine et plus sûre.

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