Retour en grâce d’espèces oubliées : À Nauru, des petits pêcheurs apprennent à pêcher le calmar chipiloua en toute sécurité

Nouméa

Photo:La présence de calmars chipiloua a été confirmée à Nauru. (©William Sokimi, CPS)

 

Cet article a été compilé dans le cadre de la Lettre d'information sur les pêches de la Communauté du Pacifique #169

L’objectif de cette initiative, dont les plans avaient été établis mi-2016 dans le cadre du projet « De la montagne au récif » du Fonds pour l’environnement mondial, était d’aider les petits pêcheurs à faire face aux évolutions du secteur de la pêche qui ont une incidence sur leurs moyens de subsistance. Des consultations sur la gestion communautaire des pêches ont ensuite été lancées, afin d’aider les communautés à mieux comprendre leurs ressources halieutiques et à les exploiter de manière durable. Le but était de former des pêcheurs locaux et le personnel du Service des pêches et des ressources marines de Nauru (NFMRA) à l’utilisation des dispositifs de concentration de poissons (DCP), aux procédures de sécurité à bord des petites embarcations, aux procédures opérationnelles pour la pêche à petite échelle, aux méthodes de pêche en pleine eau et au ciblage d’espèces sous-exploitées, telles que le calmar chipiloua et le calmar commun. Il aura fallu un certain temps pour réunir les fonds nécessaires et régler les aspects logistiques du volet pratique de la formation, mais, mi-2019, tout était en place. Toutefois, en raison de la pandémie de COVID-19 et de la période d’incertitude qui s’est ensuivie, le projet a dû être reporté à septembre 2022.

Formation : pêche à petite échelle et sécurité à bord des petites embarcations

La formation, axée sur la pêche à petite échelle et la sécurité à bord des petites embarcations, s’est déroulée dans le nouveau complexe du NFMRA, qui accueille ses bureaux et un atelier consacré à la pêche côtière. Elle a réuni 20 participants de huit districts : Aiwo, Anetan, Baitsi, Boe, Denig, Meneng, Uaboe et Yaren. Rapidement, le bruit a couru qu’une telle formation était organisée sur l’île et une soixantaine de pêcheurs supplémentaires ont souhaité s’inscrire en cours de route. Il leur a été demandé d’attendre le prochain cycle de formation, étant donné qu’ils avaient manqué des informations cruciales communiquées les deux premiers jours et que le format de l’atelier n’était pas adapté à un grand nombre de participants.

La formation s’est déroulée en deux parties sur deux semaines :

  • Semaine 1 – Présentation du contenu de la formation ; plans, procédures et listes de contrôle pour la sécurité de l’exploitation des bateaux  ; pratiques de pêche sûres  ; gestion des urgences en mer  ; gréement des engins de pêche pour les différentes méthodes  ; et comptabilité.
  • Semaine  2  –  Préparation des embarcations avant la mise à l’eau  ; chargement et préparation des engins de pêche ; séquence pratique de pêche ; manipulation et stockage des prises à bord ; qualité des poissons destinés à la vente ; et enregistrement des prises.

Deux sorties de pêche ont été organisées sur deux journées distinctes. Les deux sorties ont commencé par la pose de six palangres verticales, puis par le mouillage en pleine eau de dix  lignes dérivantes garnies d’appâts. Les participants ont ensuite pu se familiariser avec la pêche à la traîne et la pêche à la turlutte. Toutes les techniques de pêche utilisées ont permis de réaliser des prises : petits thons jaunes et bonites pêchés à la traîne à double leurre ; marlins capturés au moyen d’une seule traîne munie d’un absorbeur de choc  ; thons jaunes, coureurs arc-en-ciel, carangues et vivaneaux chien rouge pêchés à l’aide de la technique de la pierre perdue et de la méthode des sacs à camoufle ; coureurs arc-en-ciel et petits thons jaunes pêchés à la dandine avec une tige d’acier lestée. On a enregistré quelques ratés à la touche avec les palangres verticales, mais plusieurs requins ont été capturés (et relâchés).

Un calmar chipiloua fraîchement pêché et le type de leurre utilisé lors des essais. (©William Sokimi, CPS)
Un calmar chipiloua fraîchement pêché et le type de leurre utilisé lors des essais. (©William Sokimi, CPS)

Essais de pêche du calmar chipiloua

Le calmar chipiloua (Thysanoteuthis rhombus) est une espèce hauturière de grande taille relativement sous-exploitée dans le Pacifique insulaire. Cette espèce pourrait dès lors constituer une nouvelle ressource pour les États et Territoires insulaires océaniens. Des essais de pêche ont confirmé la présence de calmars chipiloua dans les eaux de plusieurs pays du Pacifique, à savoir les Îles Cook, les Fidji1 et la Nouvelle-Calédonie. Le dernier essai en date a également confirmé la présence de calmars chipiloua dans les eaux côtières et au large de Nauru, ce qui a permis d’informer les pêcheurs de la présence de cette espèce, qui peut être pêchée à des fins alimentaires. Lors de cette mission de quatre jours sur la côte ouest de Nauru, l’équipe du NFMRA a également appris à effectuer des campagnes de pêche expérimentale et des pêcheurs locaux ont été formés aux méthodes de pêche du calmar chipiloua.

Le matériel utilisé pour pêcher le calmar chipiloua comprend une palangre verticale à laquelle sont attachés un bâton lumineux étanche et trois leurres armés de deux couronnes de minuscules hameçons sans ardillon. Le bâton lumineux et les leurres sont mouillés à une profondeur d’au moins 450 m et la ligne est soit animée directement depuis le bateau soit laissée à la dérive, attachée à deux flotteurs en surface.

Il est intéressant de noter que les engins de pêche expérimentale sélectionnés à Nauru diffèrent de ceux employés pour les essais effectués ailleurs dans la région1. Habituellement, le moulinet utilisé pour la pêche à petite échelle du calmar chipiloua est un moulinet hydraulique ou électrique spécialement conçu à cette fin. Le moulinet choisi à Nauru était destiné à diverses utilisations. Il devait notamment servir de treuil pour remonter les palangres verticales et permettre de réaliser d’autres essais, dans le cas où le NFMRA souhaiterait explorer d’autres perspectives (par exemple, la pêche du vivaneau). En outre, une palangre verticale monofilament a été déployée à la place d’une ligne tressée ou d’un câble, très souvent privilégiés pour ce type de pêche. Meilleur marché, la ligne monofilament présente plusieurs défauts par rapport aux câbles et aux lignes tressées : elle est plus volumineuse, ce qui limite le nombre de lignes mères pouvant être enroulées sur la bobine du moulinet, elle a tendance à dériver plus rapidement, et elle peut s’arquer en son milieu en cas de forts courants et se détendre lorsqu’elle est soumise à une charge.

Essais de pêche du calmar commun

Bien que les pêcheurs de Nauru soient depuis longtemps au courant de la présence d’une importante population de calmars communs (Loligo vulgaris) dans leurs eaux, le plus souvent, cette espèce n’est capturée qu’au hasard d’opérations de pêche ciblant d’autres espèces. On manque de connaissances sur les méthodes de capture et la saison de pêche de cette espèce, alors qu’il existe un réel intérêt pour la diversification des prises. Le calmar commun est par ailleurs une espèce prometteuse sur le plan commercial, sachant que des calmars importés sont vendus dans les restaurants et supermarchés. Reste à déterminer quelles espèces peuplent les eaux de Nauru, leurs saisons de pêche respectives et la possibilité d’en pêcher des volumes suffisants pour satisfaire la demande locale.

Les essais de pêche ont été effectués sur deux soirées, de 18 heures à minuit. Ce n’était malheureusement pas la bonne saison pour la pêche du calmar commun à Nauru, mais, comme l’équipe de la CPS et les engins étaient sur place, il a été décidé d’au moins montrer les différentes méthodes à l’équipe du NFMRA, en prévision de la saison à venir. Le temps n’était pas idéal le premier soir, avec une mer agitée et des vents de 15 à 20 nœuds, mais l’équipe a tout de même installé et relevé les lignes pour tester le matériel. Le deuxième soir, un seul calmar a été capturé. Même si ce n’était pas la bonne saison, l’équipe du NFMRA a eu l’occasion de pratiquer cette méthode de pêche et d’apprendre à monter les bâtons lumineux, à filer l’ancre flottante et à gréer le matériel.

Quelles seront les prochaines étapes ?

Bien que les participants aient pu assister à une formation pratique sur les principes du montage et du mouillage des DCP, les conditions météorologiques n’étaient pas favorables à une mise à l’eau. Une nouvelle mission est donc prévue à Nauru en 2023 pour terminer cette partie de la formation.

Pour plus d’informations :
William Sokimi, Chargé du développement de la pêche (techniques de pêche) à la CPS | [email protected]

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